Le Beau Danube noir (18)

Chapitre XVIII
Zoé déménage

La police fédérale surveillait une villa de la Wolkersbergenstrabe, à Hietzing, un quartier cossu de Vienne où la délinquance est rare.

« Ve crois qu’on nous va repéré, patron, v’ai vu paffer une foiture te polife.

– Arrête de zézayer comme ça ! Ça commence vraiment à m’agacer.

– Mais, patron, f’est fous qui ne foulez pas que v’aille fez le tentifte.

– Si tu vas chez le dentiste, il te demandera comment ça t’est arrivé, imbécile !

– Tout fa à cauve te fette petite pefte ! En pluf, elle est mofe comme un pou.

– Tu la trouves laide parce qu’elle t’a brisé.

– À commenfer par les tents ! »

Franck, machinalement, décrocha le téléphone et fit défiler l’historique des appels.

« Quelqu’un a appelé la Syldurie ?

– Oui, moi, pourquoi ? répondit Judith.

– Et qui donc as-tu appelé, en Syldurie ? On peut savoir ?

– Eh bien oui ! J’ai appelé Lynda pour savoir où elle en était avec la rançon.

– Sur le téléphone fixe ?

– Ben oui ! J’avais oublié le portable dans la voiture.

– Elle a téléphoné à Lynda de la maison ! Mais c’est pas possible une gourdasse pareille ! Pas étonnant que ça sente le condé dans le quartier. C’est toi qui les as attirés ici, espèce de grognasse. »

Judith fit claquer l’ouverture d’un couteau à cran d’arrêt qu’elle avait caché dans sa poche et le pointa sur la gorge de Franck.

« On ne me parle pas comme ça ! C’est bien compris ? Je ne suis pas une grognasse ni une gourdasse. Je te rappelle que la reine du monde, c’est moi. La prochaine fois, je te saigne comme un pourceau. C’est bien compris ?

– Ne te fâche pas comme ça, ma petite Juju d’amour. Je ne recommencerai plus, c’est promis. Tu n’es pas une gourdasse, d’accord. Je me suis un peu énervé. Je te demande pardon. »

Judith replia son arme et la remit en poche.

« Oui, bon ! Ça va pour cette fois, mais ne recommence pas.

– Bon ! Ce n’est pas le moment de nous chamailler. Il faut partir avant qu’on nous trouve. Helmut ! Détache-moi la gamine et amène-la-moi.

– Ah non ! Patron ! Pas fa !

– Pourquoi ?

– Parfe que v’ai peur. Tant qu’elle est attafée, fa va. Mais fi ve la tétafe, elle fa encore me taper.

– On peut dire que tu es bien secondé, mon ami ! Un garde du corps qui a peur de se faire battre par une fillette ! Je vais aller te la chercher, moi, cette tigresse. »

Judith descendit à la cave et remonta promptement, poussant Zoé qu’elle maîtrisait en lui maintenant les poignets en arrière. La petite avait fait le plein d’ironie :

« Alors, Helmut ? À ce qu’il paraît, on a peur de la petite rouquine ?

– Helmut, pas Elmut. En allemand, on prononfe le haf.

– Hhh… Hhh… Hhhelmut.

– F’est tévà mieux.

– Tu es un poltron Hhhelmut.

– Bon, ça suffit maintenant ! cria Judith. Petite insolente ! Si Helmut n’est pas capable de t’apprendre le respect, moi, j’ai une méthode efficace.

– Vous réglerez vos comptes plus tard, intervint Franck, en colère. Pour l’instant, il faut se barrer d’ici.

– Pour aller où ? Tu en as une idée au moins ?

– Pour aller où ? Mais en Syldurie, bien sûr.

– En Syldurie ! C’est vraiment le dernier endroit où j’ai envie d’aller. Et d’ailleurs, les Syldures sont des ânes. Ils n’y comprennent rien à ma musique.

– Mais, bougre de cloche ! On n’en a rien à lustrer de ta musique ! La Syldurie, c’est bien le dernier endroit où l’on pensera à aller nous chercher. Et d’ailleurs, cela te rapprochera de ton nouvel amant.

– Lequel ?

– Ah oui ! C’est vrai ! Tu en as un nouveau tous les quarts d’heures ! Élie.

– Élie ? Ah oui ! Élie ! Ah ! Celui-là ! Il n’est mon amant que dans ses rêves, et il s’imagine qu’il est le seul ! Il fait partie des remplaçants.

– Tu as tort de le mépriser. Ce n’est peut-être pas un Adonis, mais c’est un as du piratage informatique, et nous pourrions avoir besoin de lui pour infiltrer les secrets du royaume de Syldurie.

– Comment sais-tu tout ça ?

– Mon omniscience. Et je sais des choses sur son pédigrée qui vont t’étonner.

– Vraiment ?

– Sais-tu seulement son nom de famille ?

– Non.

– Houareau.

– Houareau ? C’est un nom de mon pays, ça.

– Mais pas très courant en Syldurie. Et qui connais-tu d’autre, comme Houareau, en Syldurie ?

– Je ne sais pas, moi…

– Félix Houareau, son paternel : le sous-pasteur de l’église d’Arklow.

– Ah oui ! Quand même…

– Bon ! Cette discussion n’a que trop duré. Il faut s’en aller, maintenant. Nous appliquons notre plan d’urgence. Heureusement, je l’ai calculé au moindre détail. Tout le monde dans la Jaguar ! Non, l’Audi ! Non, la Jaguar ! »

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© 2021 Lilianof

Publié par Lilianof

J’avais quatorze ans lorsque m’est venu le désir de devenir écrivain. Mais après l’adolescence, j’ai décidé de ne plus écrire. Ce n’est qu’après trente ans de silence que m’est venue l’idée d’une très courte comédie : « Un drôle d’héritage ». C’était reparti ! Après avoir été facteur dans l’Eure-et-Loir, je suis installé, depuis 2013, à Vieux-Condé, où je retrouve mes racines, étant petit-fils de mineur. La Bible et Molière sont mes livres de chevet.

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