La Chemise d’un homme heureux

La Chemise d’un homme heureux

D’après Léon Tolstoï

Le roi se meurt, il a peur de l’enfer,
Pâle et tremblant sur son grand lit de fer.
À son chevet les savants et les sages,
Les charlatans, les prêtres et les mages,

Les docteurs les plus valeureux.

Ils sont venus, répondant à l’appel
Du prince en pleurs, tous invoquent le Ciel :
« Oh ! Prends pitié, Seigneur, offre ton aide,
Pour ce bon roi donne-nous le remède

Pour guérir le mal douloureux. »

Dans la ferveur et la contrition
Ils recevront la révélation.
Le plus ancien se lève et prophétise :
« Veux-tu guérir ? Endosse une chemise,

La chemise d’un homme heureux. »

On détacha cinquante cavaliers
Interrogeant barons et roturiers.
Tous les sujets du pays sont en peine :
L’un sans le sou, solide comme chêne,

Tel autre riche et souffreteux.

« Si vous saviez combien j’ai de tracas !
Femme exécrable et de goût délicat,
Vraie courtisane arrogante et fière,
Capricieuse et toujours en colère,

Et pourtant j’en suis amoureux. »

« J’ai plus qu’assez de mes deux chenapans !
Toujours rebelles et désobéissants,
Ivres sans cesse et poursuivant les filles,
Couvrent de honte une honnête famille.

Si j’avais des fils vertueux ! »

Seul, égaré, chevauchant dans un bois,
Près d’un taudis passe le fils du roi.
Point de carreau pour l’unique fenêtre ;
Point de lumière au foyer ne pénètre.

C’est vraiment la maison d’un gueux !

Un baryton entonne un chant pieux :
« Je suis en paix, car mon cœur est à Dieu ;
Je suis sauvé, n’est-ce pas magnifique ? »
Tout en riant, il chante des cantiques.

« J’ai cent raisons d’être joyeux. »

« Vends ta chemise, dit le prince de sang,
Je t’en paierai mille boisseaux d’argent.
– J’ai pour dormir ma fine couverture,
Un sac de jute pour ma seule vêture. »

Point de chemise à l’homme heureux.

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© 2021 Lilianof

Publié par Lilianof

J’avais quatorze ans lorsque m’est venu le désir de devenir écrivain. Mais après l’adolescence, j’ai décidé de ne plus écrire. Ce n’est qu’après trente ans de silence que m’est venue l’idée d’une très courte comédie : « Un drôle d’héritage ». C’était reparti ! Après avoir été facteur dans l’Eure-et-Loir, je suis installé, depuis 2013, à Vieux-Condé, où je retrouve mes racines, étant petit-fils de mineur. La Bible et Molière sont mes livres de chevet.

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